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Mots en fête
17 janvier 2022

NOS HISTOIRES N°4 Décembre 2021

 

 

1)La jeune employée du magasin de chaussures avaient les traits tirés. Elle n’en pouvait plus, ne dormait plus depuis qu’elle avait accepté ce travail. Son pied bot pesait comme une enclume sur sa fiche de poste.

Elle traînait les pieds,  le pas aussi lourd que l’âme. Elle aurait voulu être ailleurs.

Et je la regardai depuis l’extérieur, elle  dans sa boutique,  moi sous la pluie ruisselante qui trempait mes pieds.

J’avais besoin de lui parler, de lui dire que ce n’était qu’un travail et qu’à la fin de la journée, il y aurait une autre vie…avec moi.

Mais je ne la connaissais pas, tous les jours je l’observai. Comment lui dire mon admiration, ma compassion devant le sort que lui réservait sa patronne !

Elle avait créé son magasin il y a une bonne vingtaine d’années, elle avait la phobie - chose incroyable- des pieds ! Elle avait rêvé devenir danseuse afin que ses pieds ne touchent plus le sol !

Quel paradoxe ! en fait la vie aurait été plus facile si elle avait été oiseau ou serpent : pas besoin de pieds !

Pouvoir lui faire un pied de nez ! à vue de nez, la solution doit être là, à ma portée !

Tant pis ! je me lance. J’ouvre la porte et saute au cou de la patronne.

Je me rendis compte de ma bévue aux yeux exorbités qu’elle m’adressait ! Myope comme une taupe, je m’étais trompé de personne ! C’est la petite vendeuse au beau pied bot que je désirai, moi le myope aux yeux de velours !

 Je la pris par sa taille (de guêpe) et nous nous enfuîmes de cet enfer moderne !

 

 

2)Je voudrais me souvenir et en rire malgré tout. C’est confus dans ma mémoire mais je me rappelle des fous rires.

Nous étions enfants, garçons et filles du village, comme frères et sœurs. Impertinents  joueurs, toujours prêts à faire de bonnes farces aux adultes.

Le jeudi après-midi nous nous baignions dans la rivière ; elle était pure et translucide , nous la buvions à grandes gorgées.

Tout cela était fini ! le psy m’a dit : » il faut enfermer tout ce qui fait mal dans une petite boîte et jeter la clé au loin ! » Si, si, il a osé ! Il faut savoir souffrir, si on veut guérir !

Garder les meilleurs souvenirs et avancer : les souvenirs d’enfance sont tellement merveilleux !

Mais la perte de son ami  d’enfance se ressent comme la perte de sa propre vie !

 

Aller de l’avant, regarder devant ! Voilà ce que je me dis tous les jours, engluée dans la réalité grise ! En sortir vivante avec le désir de faire claquer ses semelles, les cheveux  au vent, les poumons dilatés, respirer !

Engranger d’autres souvenirs, être attentif aux petits instants, au présent et jouir pleinement !

Alors je me prends une bonne bouffée d’air et me mets à rire à pleins poumons.

J’ai retrouvé mon âme d’enfant, un regard innocent sur la vie !

 

 

3)La cérémonie était vraiment surprenante. Pas de quoi rire à pleins poumons quand même !

Le marié portait un chapeau pointu, une redingote verte et un pantalon rouge.

Je me suis dit, dans mon costume douze pièces, qu’on allait passer une journée mémorable ! La messe était dite en latin et tout le monde chantait. Une harmonie surprenante !

Le curé, un baryton à la voix extraordinaire, lançait ses credo et ses confiteor avec force et volupté. Le petit enfant de chœur ponctuait les refrains de yeah, yeah, yeah !

Vous pensez peut-être que j’ai imaginé cette scène ? Vous y êtes presque ; ce n’est pas la mienne ! Pourquoi m’encombrerai-je des souvenirs d’un autre ! En plus, je déteste les fêtes religieuses. Faut-il vraiment vivre pour savoir que Dieu n’existe pas !

Dans tes rêves, quelle imagination tu as ! Justement, imaginer la vie qu’aura mon amie avec cet homme rencontré au hasard de ses voyages. Un bel homme dans ses habits de clown !

 C’est le moment d’échanger les anneaux et d’écouter le prêtre, il a de très grandes oreilles et pas de cheveux sur le crâne ! En plus il louche !

Bof ! L’important n’est pas là !

Prendre les choses comme elles viennent et en tirer le meilleur !

 

4)Vingt heures, le coucou est sorti, il émet sa chanson.

Le tic-tac régulier un peu monotone me donne des frissons ; en plein hiver, il fait un peu frais dans cette maison ! Elle est trop grande, un vrai château perdu dans la campagne et j’y vis seule !

Soudain un bruit à l’extérieur, strident, métallique. Je vais chercher mon fusil à pompes : il faut savoir se défendre par les temps qui courent.

La porte d’entrée vole en éclats ; un homme se tient dans l’encadrement, une kalachnikov dans les bras et hurle « c’est l’heure, ma p’tite dame ; l’arche vous attend ! »

Je me réveille au son de l’orage qui a éclaté lorsque la porte a volé en éclats ! Ouf ! Juste un cauchemar !

On pouvait s’y attendre ; désolée pour les amateurs de sensations fortes ! ce n’est qu’une histoire !

Gérard ! Lève-toi, nom d’un chien, il y plein d’eau dans la cuisine !

Tu n’as qu’à te débrouiller avec tes casseroles ! Moi, je dors dans le silence de la nuit des temps !

 

5) Ce matin est différent : je m’éveille à l’aube échevelée, encore toute engourdie de rêve.

J’ai fait un rêve bien différent ; je n’en dirai rien sinon la tristesse de ne pas l’avoir’ partagé  avec toi comme je partage tout.

Mais, tu m’as laissée là, plantée dans cet appartement silencieux, trop silencieux ; J’ai peur !

J’avais rêvé d’un petit matin tendre, enfin avoir le temps ! mais non ! il a fallu que tu enfiles tes baskets pour ce satané jogging !

Et puis le silence, le silence total, tu as disparu !

Les gendarmes sont passés ce matin à la maison, ils ont commencé à me raconter cette drôle d’histoire :Je n’y comprends rien ! Que se passe t-il ? Pourquoi ? Revenir à la réalité, ne pas paniquer, tout me semble si étrange ! Est-ce bien de toi dont il s’agit ?

Un homme a assassiné tous ses voisins ; les gendarmes te soupçonnent !

Toi ! Mon doux chéri ! Impossible ! Tu ne ferais pas de mal à une mouche.

Pourtant j’y pense tu étais bizarre, fuyant…je ne te reconnaissais plus !

J’aurais dormi vingt ans auprès d’un assassin, qui ne m’a pourtant offert que douceur et tendresse ! Je suis sûre que tu avais une bonne raison ; les voisins franchement étaient très cons !

Je viendrai te voirau parloir, mon amour. Je t’attendrai l’éternité,s’il le faut. . Je t’apporterai des oranges sanguines et des grenades, tes fruits préférés !

 

6) Il pleut des cordes, je suis au milieu de nulle part, mon pneu est à plat !

La barbe ! Même mon téléphone me lâche !

Tout est noyé sous la pluie, rien ne se distingue dans ce paysage luisant ! Que dois-je faire ?

Je décide de monter sur le promontoire, j’ai envie de hurler… je ne sais pas nager…

Je me ressaisis, je respire un bon coup ; ce n’est pas possible de n’y pouvoir rien !il y a sûrement une solution !

Mais, je rêve…j’aperçois au milieu du tumulte une silhouette que je ne distingue pas correctement !

Le docteur Horizon, mon psychanalyste est là ! Pour sûr, il va me sauver !

Mais que fait-il donc là ? Il me suit ? Je le trouve bizarre. Il se voudrait incognito mais son masque est mal choisi ; il commence à m’effrayer ! ses yeux sont pleins de convoitise !

Il s’approche de moi, si près qu’il me frôle ! Il a une haleine de poney, sûrement à force de ruminer des idées salaces ! Je suis tétanisée, ses yeux fous me pénètrent.

Je ne vois que le reflet de la lame qu’il me plante dans le ventre !

Bien logiquement vous espériez des détails salaces ? Bon d’accord ! il enfonce la lame et m’arrache …un cri, ultime exhalaison ! Mon sang se répand. Est-ce son premier meurtre ? Est-ce que vous aimez voir  ça ?

Mince alors, toute cette eau me donne des idées complètement dingues ! Je n’ai jamais eu de psy !ilva falloir que je lise autre chose que des romans policiers !

Oui mais en attendant, je fais quoi ?

Ah ! Enfin un bruit de moteur. La voiture s’arrête à ma hauteur.

Un grand type, barbu, hirsute, tatoué, balafré ! Flippant…

 

7) Voilà pourquoi cela s’appelle un cadavre exquis. Je suis à peine né que je vais mourir !

Pourquoi ? Je viens d’apprendre que d’autres vont me réécrire. Je suis là et on va me faire disparaître ! Honte à vous !

Pas une disparition, une renaissance, une nouvelle vie ! De gendarme, je deviens voleur !

J’ai toujours rêvé d’être ce que je ne suis pas. Voleur ! Une belle occasion de visiter les maisons qui me font rêver !

Mais le plus grand de mes rêves, ce n’est pas encore tout à fait celui-là. Certes, les belles maisons, les belles voitures, les beaux bijouxm’ont toujours fait rêver, mais pourquoi désirer ce que l’on ne peut avoir ?

Me voilà en train de philosopher, de m’interroger, mais il faut prendre une décision et agir !

Je pourrai me satisfaire d’une vie banale et mourir sans laisser de traces de mon passage.

Non ! Je veux être célèbre ! Demain, je cambriole les villas du Touquet !

J’en connais une ! J’y trouverai mon content !  Devinez laquelle !

Je m’installerai pour un temps, on n’expulse personne pendant l’hiver, même les vauriens !

Dans un cadre doré sur le manteau de la cheminée, un homme sourit, une femme blonde à ses côtés.

Quelle triste conclusion, Mesdames, Messieurs, de voir que le parti choisi a été détourné ; je ne reconnais rien, ce ne sont pas mes aventures, je veux dénoncer vos impostures !

On me parle de voitures, de villas, de murs, quoi !

Moi, je veux me sentir libre ! Personne pour diriger ma vie !

Laissez-moi mourir au lieu de chercher à me noyer ! Jamais je ne serai gendarme, ni voleur, ni profiteur, ni philosophe.

Inventez celle qui saura me plaire, peut-être me donnera- t-elle une raison de vivre !

 

8) Il était une fois un meunier dans un pays perdu au bord d’une belle rivière.

Sa femme et ses enfants viennent de le quitter.

Il ne connaissait pas les raisons de ce départ, si brusque, si incompréhensible.

Mais il fallait continuer à travailler malgré sa peine, sa grande fatigue. Il s’interrogeait jour et nuit sur son insupportable solitude. Etait-il ronchon, invivable à ce point ?

Mais non ! Sa femme avait peur des souris ! Et les sacs de blé étaient des cavernes d’Ali-Baba. Pourquoi n’y avait-il pas pensé plutôt ? Les souris !

Le meunier a préparé son baluchon, bien décidé à reconquérir sa dulcinée et sa progéniture. Au petit matin, le voilà parti…

Un  récit bien décousu ! Je suis le meunier et je peux vous le dire : aucune voix ne saurait rendre compte de mon mal-être. Et celles qui tentent de le faire ne font qu’aggraver mon mal. Si vous avez quelque pitié pour moi, n’écoutez que moi !

Vouloir encore moudre du blé dans un moulin à vent ! Quel ringard, je ne peux plus vivre avec lui : le bruit, ce moulin qui bouge sans arrêt, les souris et j’en passe ! Je me taille à la ville !

Et qu’il ne cherche pas à me retrouver ! J’en ai bavé pendant toutes ces années ! La belle rivière, la campagne, j’en ai par-dessus la tête !

Il retrouvera vite une bobo en mal de nature et de vie authentique. Elle ne sera pas déçue, lui qui préfère les hommes !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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